Réseaux sociaux : soyons prudents sur les informations que nous relayons et partageons !


Fréquemment sur Facebook, ce fabuleux réseau social qui permet de diffuser et partager des textes, images, vidéos à des « amis » réels ou virtuels, je suis étonnamment exaspéré par des publications qui « balancent », souvent brutalement, des informations, sans prendre le temps d'en citer la source, le contexte, le point de vue qui s'exprime.

Ce qui est encore plus surprenant, c'est de voir que, sur le mur d'amis d'ordinaire pleins de bon sens et de discernement, ces publications sont prises pour des vérités absolues, renforçant ainsi le « buzz » (« bourdonnement ») autour de ces informations.

Les exemples ne manquent pas. Ainsi, des informations circulent selon lesquelles le Président de la République fournirait des armes à des mouvements terroristes combattus par ailleurs en Afrique. Evidemment, aucune source n'est citée. Dans une autre publication, j'apprends qu'une « Française » (sic) se serait vu refuser une aide alimentaire, alors que la France offrirait des logements et des aides financières aux migrants. Le texte est illustré par une photo qui, quand on y regarde de plus près, est truquée : ce serait un extrait d'un reportage de TF1, or le logo de la chaîne n'est pas placé au bon endroit (en bas au milieu au lieu d'en haut à droite, comme c'est le cas dans les JT), ce qui prouve que c'est bien un montage. Le lien qui est partagé renvoie à un site qui est un véritable défouloir mensonger et haineux envers tout ce que fait et dit François Hollande, sans parler des fautes presque à chaque phrase !

D'autres exemples ? Je continue : nous apprenons tous, avec stupéfaction, le « saccage » d'une école à Melun par des enfants « de 5 à 13 ans ». La presse s'emballe, tout comme les réseaux sociaux : c'est à cause des enfants de la cité « sensible », il suffit de les sanctionner tout comme leurs parents qui les éduquent mal ! Il ne s'agit pas pour moi de nier des faits, mais de constater la partialité des commentaires : si les enfants concernés ont leur responsabilité, s'il faut en effet se poser des questions sur le rôle des parents, je lis ce matin que ce la présence d'enfants de 5 ans n'est pas confirmée par le parquet. Trop tard : la machine médiatique est lancée ! Cela ne change pas grand chose au problème, me direz-vous. Mais il faut replacer cet acte de destruction de matériel et de locaux scolaires, loin du langage quasi-apocalyptique employé ici et là, dans un contexte plus global. C'est un éducateur de rue, interrogé à la télévision, qui m'a alors mis la puce à l'oreille : comme dans beaucoup d'autres quartiers dits « sensibles », il y a un vrai désœuvrement de la jeunesse faute d'activités en journée, de structures municipales et associatives adéquates, ce qui je justifie aucunement la destruction, bien entendu, mais peut l'expliquer. Je tombe alors sur un autre site livrant le témoignage d'une de ces structures associatives, dont le budget a été réduit par la municipalité ! Celle-ci est gérée par un parti politique qui n'a eu de cesse, durant 10 ans et même plus, de considérer la jeunesse comme non prioritaire, sauf sous le seul et unique angle sécuritaire, judiciaire, pénal... Les mêmes proposaient de détecter la délinquance des moins de 6 ans, sans justement se poser la question des conséquences de leurs choix politiques et budgétaires ! On croit rêver, mais c'est pourtant bien le cas dans cette histoire.

Un dernier exemple, qui date d'hier lui aussi : un site médical (dont je n'avais jamais entendu parler), présenté comme sérieux, affirme que des chirurgiens et infirmiers passeraient beaucoup trop de temps à utiliser leurs smartphones dans les blocs opératoires. A la radio, on présente cela comme un fait réel, en citant seulement ce site. J'entends alors un médecin qui apporte le point de vue le plus pertinent : comment croire à une étude réalisée par un site qui n'indique même pas la méthodologie qu'il a utilisée pour obtenir ces statistiques, comme toute étude doit le faire ? Comment se fait-il, vu le nombre d'hôpitaux et de malades, que personne n'ait dénoncé ces pratiques avant ? Il invite ensuite à la plus grande prudence concernant cette polémique, mais rien n'y fait, l'animateur radio conclut l'entretien en rappelant les pseudo-faits et en disant juste : « merci, docteur, vous nous avez un peu rassurés », alors qu'il a simplement fait part de ses réserves sur ces infos ! Les réseaux sociaux s'emballent, encore, et les commentaires s'affolent sur une nouvelle information non vérifiée.

Plus c'est énorme, plus cela semble véridique et plus c'est contagieux : ainsi, l'agression d'une jeune femme en maillot de bain dans un jardin public a exacerbé, une fois encore, toute la haine raciste d'une partie de la population, sans même attendre la vérification de ce fait ! A aucun moment, les gens ne se disent : « non, ce n'est pas possible, c'est trop gros pour être vrai « !

Je le répète inlassablement aux stagiaires et aux élèves que j'accompagne : avant de relayer ou diffuser une information sur les réseaux sociaux, il faut absolument prendre le temps de vérifier, me semble-t-il, trois signaux d'alerte :
  • D'où vient l'info ? Quel est le site qui la diffuse, qui en sont les auteurs (tant de sites sont gérés par des adeptes des idées extrémistes ou complotistes!)
  • Puis-je la trouver sur plusieurs sites considérés comme viables : quotidiens nationaux, télévisions, radios, hebdomadaires ? J'entends déjà mes complotistes préférés me dire que de toute façon, « on nous cache tout, on nous dit rien » comme chantait Dutronc, ce qui prouve déjà que ce doit être absolument vrai puisque ce n'est pas vérifié !
  • L'émotion suscitée par cette info (et cela est bien légitime) est-elle mesurée ou disproportionnée ? Je m'étonne ainsi que la « communauté Facebook » s'émeuve de la mort d'un lion (si absurde et scandaleuse soit-elle) mais beaucoup moins d'un enfant atrocement mort dans l'incendie volontaire de sa maison par des extrémistes...


De la prudence, du discernement, de la réflexion après l'émotion, voilà des garde-fous qui me semblent indispensables pour démêler l'écheveau complexe du flot incessant d'information et de désinformations qui nous inondent chaque jour.

Commentaires

  1. Excellente mise au point en effet. Le probleme c'est que les medias de nos jours marchent essentiellement de cette maniere. Sauf une partie de la presse ecrite , minoritaire, et certains sites internet comme votre page. Mais la majorite des gens se fie a ce qu'ils connaissent et ont l'habitude de lire, ecouter, etc...

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